Parmi les mémorables visites que nous avons effectuées, nous vous en présentons aujourd’hui 4, que nous avons regroupé de façon tout à fait subjective en 2 catégories : les « weingut » où nous avons été reçus par une employée chargée des relations publiques, et les endroits où nous avons été accueillis par le vinificateur lui-même. Des expériences différentes, mais tout aussi enrichissantes.
LA VIEILLE GARDE
Bürklin-Wolf (*Bio), notre toute première visite, est une entreprise encore « familiale » dont les premiers balbutiements remontent à quelques siècles. On rencontre la sympathique Annette, la directrice des exportations, dans son bureau situé au fond d’un grand corridor d’une construction d’époque victorienne. On sent tout de suite l’aisance matérielle et financière de l’entreprise. D’ailleurs, Max, notre contact de la tonnellerie et guide pour la semaine, blague que la moitié du riche village de Wachenheim leur appartient. Un peu plus corporate comme feeling.
Le chai, souterrain, est absolument magnifique, avec plus d’une centaine de foudres. Dans le vieux cellier, on remarque d’anciennes bouteilles couvertes de Racodium cellare, la moisissure « classique » des chais ; les fioles datent de la fin du 19e siècle. Impressionnant.
La dégustation s’effectue dans un autre bâtiment que l’on rejoint en voiture, d’où l ‘on aperçoit un grand jardin qui sert d’aire de pique-nique pour les visiteurs en saison chaude. On goûte une bonne partie de leurs 2017, et on a droit à quelques vieux millésimes. Ça commence bien nos visites !
Nous avons eu le même genre de visite chez Schloss Vollrads ; situé dans le Rheingau, à Oestrich-Weinkel, on y retrouve les plus vieux « reçus » au monde attestant de vente de vin (800 ans). Christine nous reçoit avec un verre parmi les vignes, puis nous nous dirigeons vers le château (Schloss). Toutes les vignes ceinturant le domaine (qui comprend ledit château, une tour, un chai, un endroit pour la vinification, un restaurant, etc.) leur appartiennent, de même que la forêt derrière, ce qui confère aux vignes en contre-bas un micro-climat qui, entre autres, les épargne des forts vents. Orientés plein sud, les raisins atteignent une belle maturité.
Jamais détruit à travers les maintes guerres que la région a connues, il s’agit à certains égards d’un musée de l’histoire aristocrate allemande. Leur histoire récente est quelque peu tumultueuse (rachat étranger, décès soudain), mais le domaine semble tenter de moderniser son image, par exemple plusieurs événements artistiques y tenant place durant la saison estivale.
Fait divers : l’équipe est derrière la création de la bouteille « unique » à plusieurs angles, qui se veut un hommage au Riesling et aux diverses facettes que peut prendre ce noble raisin.
Nous avons été franchement bien reçus aux deux endroits. Deux super belles expériences. Des vins mémorables. Cependant, les visites offertes à la clientèle semblent un peu plus « organisées » et cartésiennes et portent plutôt sur l’histoire du domaine et de la famille. On est un peu plus loin de l’artisan qui travaille lui-même au champ !
LES « JEUNES POUSSES »
Chez Zimmerman, on est accueillis par le vinificateur lui-même, Jürgen, dans une petite pièce sobre où il reçoit ses visiteurs, en plein cœur lui aussi du joli Wachenheim. C’est même sa mère qui nous sert les premiers verres. Max, notre « guide », s’approvisionne souvent chez Zimmerman, puisqu’il estime qu’on y trouve les meilleurs rapports qualité-prix de la région !
Sa passion pour le Riesling est contagieuse. Il nous parle avec fierté de ses plus belles parcelles comme de fils, et des sols qui les composent comme de vieux amis qu’il connaît trop bien. Un vrai passionné, et ça se goûte dans ses vins. On est repartis avec quelques bouteilles…
Chez Karl Schaefer (*Bio), c’est Johann, jeune « trippeux » récemment nommé à la tête de la vinification, qui se charge de la visite. Johann semble avoir notre âge et, après avoir occupé divers postes dans l’entreprise, s’est vu remettre les clés du chai il y a un peu moins d’un an. 2018 s’agissait de la première récolte qu’il vinifiait lui-même !
Le highlight de la visite chez Schaefer : mis à part la dégustation, qui était dans le top 3 de ce qu’on a expérimenté, ce sont sans contredit les strobolights et les mots que Johann sur chacune des barriques. Il trace à la craie des mots tels que « Leidenschaft » (passion), « Freundschaft » (amitié), afin de donner de bonnes vibes aux tonneaux et une personnalité aux vins. Ésotérique mais intéressant !
Réchauffement climatique oblige, certains vignerons du coin tentent de plus en plus le coup avec des cépages rouges. Le Pinot noir est déjà bien implanté ici, mais il n’est plus rare de voir du Cabernet-sauvignon et du Merlot, par exemple, eux qui préfèrent les climats plus chauds. Nous avons eu l’occasion de goûter du Satin noir, qui se rapprochait à notre sens à un hybride entre de la Syrah et du Blaufränkisch ; léger mais coloré, avec des notes de fruits noirs et un côté herbacé / végétal. Étonnant !
Après le tasting, il nous invite à faire ce que chaque vigneron, selon lui, attend avec le plus d’impatience dans sa journée : la bière d’après-shift ! Johann s’est empressé de nous offrir de rafraîchissantes lagers allemandes et polonaises…
Dans ces 2 visites, nos interactions ont été un peu plus proches, plus authentiques, « d’artisans à artisans » ; on leur a d’ailleurs laissé des bouteilles de Beau Bouquet et de Coming of Age – ça veut tout dire !
Texte : William Marin - Photos : Ranko Bobusic